Balade au Rajasthan
Regards de voyageurs - Asie Pacifique - Inde - 26.02.2018
Un beau récit de voyage de Brigitte et Jean fraichement recueilli à leur retour du Rajasthan en Inde.
Après une série de voyages dans les pays d'Asie centrale entre Istanbul, Samarcande et Xian, Damas et Ispahan... nos pas se sont portés vers l'Orient (Laos, Birmanie, Cambodge). Il manquait encore beaucoup de « liens » entre ces pays et leurs cultures : l'Inde pouvait en partie combler cette lacune.
Un reportage photo sur le site de Tirawa alors que nous nous apprêtions, Jean et moi, à partir au Cambodge, nous a donné envie d'aller découvrir le Rajasthan. A vrai dire nous avions déjà découvert une partie de l'Inde puisque nous avions fait en 2003 un magnifique trek au Ladhak et à cette occasion, nous avions donc déjà vu Agra.
Lorsque nous avons débarqué à Delhi le 4 novembre en compagnie de nos compagnons Monique et Pierre, Annie et Jean Paul nous avons découvert avec grand plaisir que notre guide, Thustop était ladakhi. Lui aussi était plutôt content de voir que nous avions un souvenir émerveillé de ses montagnes !
Nous allons former pendant 3 semaines avec lui, le chauffeur Azhad et Sanstoh, son assistant, un petit groupe bien homogène. Heureux de quitter la pollution de Delhi, nous prenons la route dés le 5 pour le nord du Rajasthan en lisière du désert de Thar. Il fait d'ailleurs encore une bonne chaleur dans la journée et la poussière est omniprésente.
Dans les premières villes traversées (Alsisar, Fathepur, Bikaner), nous découvrons les richesses des Havelis, ces maisons de commerçants enrichis par le commerce de marchandises vers l'Afghanistan.
Malgré leur état de conservation, parfois pitoyable, elles donnent une bonne idée de la vie confortable de ces commerçants : elles sont magnifiquement décorées de fresques ou de peintures naïves qui relatent la vie quotidienne ou des scènes de la « mythologie » hindou.
Le fort de grès rouge de Bikaner élève ses murailles à la limite du désert. Une fois les murailles franchies, on est ébloui par la finesse des sculptures des cours et par les décorations des salles avec les peintures rehaussées d'or et les incrustations de verre.
Au contraire du fort de Bikaner, celui de Jaiselmer occupe une hauteur au dessus du désert. Mais derrière ces épaisses murailles se cachent une série de palais aux décors finement ajourés dans le grès.
C'est à Jaiselmer que nous rentrerons par la première fois (après avoir laissé à l'entrée chaussures, chaussettes et bouteille d'eau !) dans un temple Jain : pas une seule colonne ni un seul mur de ces temples qui ne soient richement sculptés en l'honneur des prophètes de cette religion.
La richesse passée de Jaiselmer et sa prospérité actuelle (relative) viennent de sa position dans une zone de passage vers le désert de Thar dans lequel nous allons faire une petite incursion.
C'est au son de la musique du Rajasthan que nous assistons à un coucher du soleil...derrière la brume ! Nous profiterons un peu plus du désert le lendemain après une jolie marche dans la campagne cultivée : c'est la bonne période pour la récolte des arachides et du coton.
C'est l'eau des montagnes apportée par le canal « Indhira Gandhi » qui permet l'irrigation et la richesse relative de cette région, où le grès rouge qui a servi à construire les forts sert aussi à matérialiser les limites des parcelles de terrain.
Ce grès rouge (parfois jaune), nous allons le retrouver partout jusqu'à la fin du séjour à commencer par son extraction sur la route vers Jodhpur.
Et bien sur, il constitue le soubassement du fort de Mehrangarh et on le retrouve à l'intérieur du fort, ouvragé et décoré.
Pour nous rendre dans la vieilletour de l'Horloge, nous traversons le marché très animé de la ville dite pourtant « bleue », à cause des façades de ses maisons.
Poursuivant notre route après avoir fait, avant le départ du matin, le tour du parc de notre hôtel-écurie, Thustop nous propose de nous arrêter pour visiter un « temple de la moto »... nous trouvons l'idée saugrenue, surtout les femmes qui s'attendaient à une quelconque « casse » ! Mais quelle ne fut pas notre surprise en nous retrouvant dans un lieu de pèlerinage où les fidèles honorent par toutes sortes d'offrandes et libations la moto d'un fils de Maharadja tué accidentellement sur ce site !
A partir de là, nous allons délaisser les grands axes de circulation pour nous plonger dans la vie de tous les jours à la campagne ! L'après-midi sera marquée par un voyage en train local dans un site vallonné et couvert de forêts. Les singes inoffensifs poursuivent le train ou attendent gentiment à chaque arrivée : pas étonnant !
Les Rajhpoutes accomplissent leur « Karma » en leur distribution gâteaux et friandises que les chiens apprécient aussi!
Le lendemain, 12 novembre, sous la conduite d'Azhad, nous parcourons en mini-bus la campagne profonde avant de nous arrêter dans le temple d'un village pour assister à la prière des villageois prévenus par un judicieux système électromécanique mélangeant cloches et tambours.
Derrière le temple se trouve une très belle construction à étages. Creusé dans le sol, il s'agit en fait d'un réservoir à eau accessible par des marches, quel que soit le niveau de celle-ci.
Nous faisons ensuite connaissance avec notre guide de la matinée qui nous fera découvrir un petit bois à la recherche de quelques bêtes sauvages... Nous rencontrerons surtout des femmes entrain de ramasser du bois qu'elles portent ensuite au village. Même si, en guise de bêtes sauvages nous ne verrons que quelques antilopes, celles-ci doivent faire des ravages dans les cultures si on en croit les barrières d'épineux qui protègent les champs.
L'après-midi, nous le passerons à Ranakpur dans le sanctuaire Jain fréquenté par des pèlerins et beaucoup de touristes.
Pourtant déjà prévenus de la richesse des sanctuaires Jains à Jaiselmer, nous allons tous être époustouflés par le temple d'Adinatha.
Ce 13 novembre, changement de décor. Nous partons en direction des monts Araveli pour faire une balade sur un chemin de pèlerinage en direction d'un temple dédié à Shiva. Sa statue nous attend dans une petite grotte, bien gardée. Des singes gourmands nous accompagnent tout le long de la montée ; il faut faire bien attention à nos bananes qu'ils convoitent manifestement ! En descendant vers notre hôtel, nous traversons des champs cultivés grâce à une irrigation encore traditionnelle.
La température a changé, nous nous rendons compte à l'hôtel que nous sommes bien à 1100 m d'altitude et même si la piscine nous attire après cette balade, le bain semblera un peu frisquet aux courageux qui s'y oseront. Les polaires sont ressorties des sacs pour assister au spectacle « son et lumières » sur les murailles du fort de Khumbalgarh.
La balade du lendemain nous permettra de constater encore combien la campagne est bien cultivée. Malgré ça, les populations des villages traversés nous paraissent bien pauvres, et pourtant souriantes. Les installations des écoles bien sommaires ; cela n'empêche pas les enfants d'être très concentrés pour la récitation de leurs prières ou de l'hymne national.
Accompagnés par des foules de lycéens, adeptes des selfies, en sortie « culturelle », nous visitons l'après-midi le palais du fort de Khumbalgarh et quelques temples qui subsistent de son passé de fort de défense du Mewar entouré d'une enceinte de 38 km.
Le lendemain, nous quittons notre hôtel – relais de chasse et les monts Araveli en direction d'Udaipur. Le mini-bus traverse une région d'intenses activités agricoles à cette période.D'autres au bord de la route on délaissé les travaux des champs pour un travail plus artisanal : le confection de briques de terre cuites ensuite dans un four fait de ces briques.
À Udaipur, le décor change totalement, nous avons plutôt l'impression d'être sur la Riviera : le palais d'Udaipur domine un lac dans lequel des îles sont disséminées.
Si le site est bien différent de celui des autres palais, la décoration intérieure est tout aussi splendide : décors de verres peints, mosaïques de verre, portes en ivoire...
Les décors intérieurs rappellent aussi les vies de plaisir et de chasse des Maharadjas, mais aussi l'importance de la guerre et des combats dans ces zones frontalières.
Avant d'aller voir le soleil se coucher sur Udaipur, nous faisons le tour du temple de Jagdish dédié à Garuda. Les sculptures nous rappellent celles des Apsaras des temples d'Angkor.
Pour visiter la forteresse de Chittorgarh, nous délaissons le mini-bus au profit d'un tuk-tuk plus adapté à la route chaotique qui parcourt l'intérieur de la forteresse. Il ne reste plus grand chose des palais et des temples mais 2 belles tours dominent la colline celle de la Victoire (15 ème siècle) et celle de la Renommée (XII ème siècle).
À la sortie de la forteresse nous tombons sur les préparatifs d'une manifestation contre la sortie du film « Padmavati » reine du Mewar. On ne plaisante pas avec l'histoire en ce moment en Inde et le réalisme des manifestations est saisissant...
Le soir, nous serons accueillis comme des hôtes du Maharadja du fort de Bijaipur et nous nous prendrons deux jours durant pour ses invités ! Ce séjour va nous permettre de faire le tour des environs à la recherche d'oiseaux et de faire quelques incursions (pacifiques!) dans la vie des villageois.
Pour rejoindre notre étape suivante, Azhad a le courage d'engager son mini-bus sur une route de campagne bien amochée pour nous permettre d'observer des antilopes et nilgauts qui pâturent en liberté. Nous retournons ensuite sur la grande route sur laquelle le trafic est intense et le respect du code de la route plutôt « fantaisiste ».
Nous passerons la nuit au Bijay Niwas Palace, resté à la belle époque du Rajasthan, un peu « décati » mais vraiment plein de charme.
C'est en char à bœuf que nous ferons le tour des terres du Radja. Le périple prendra fin dans la maison d'un de nos « conducteurs » de char, les enfants nous y feront un accueil dans un joyeux chahut.
A partir du lendemain, finies les petites routes de campagne, nous nous dirigeons vers Pushkar, le passage des péages est un vrai sport pour chauffeurs expérimentés. Il faut se faufiler entre les files de voitures et camions pour passer dans un des trois postes de péage ! Avant d'entrer dans Pushkar, ville de pèlerinage pour les Hindous, Thustop nous fait entrer dans un sanctuaire Sikh. Celui-ci relève plus d'une mosquée que d'un temple hindou car il est complètement dépouillé, à l'intérieur en tout cas. Il y a également une cantine populaire qui fonctionne dans son enclos.
Pour nous rendre sur le bord des Ghâts où quelques hindous font leurs ablutions, il nous faut traverser le bazar haut en couleur et cosmopolite.
Notre voyage au Rajasthan se termine par la visite de la capitale Jaipur, ville bien différente de celles que nous avons parcourues les jours précédents. Elle fut construite au 18éme siècle sur un plan en damier, protégée par des murs, divisée en quartiers et accessible par des portes monumentales. Nous commençons la visite par l'observatoire astronomique de Jantar qui nous surprend tous par la précision des mesures effectuées par des instruments énormes en pierre de plusieurs dizaines de mètres de haut... Rien à voir avec nos appareils miniatures contemporains mais la qualité des mesures est comparable quelque soit la période de l'année.
Pour ma part, cela me rappelle le sextant géant construit par Ulug Bey à Samarcande au 15ème siècle, soit deux siècles avant cet observatoire....
L'interprétation des signes astrologiques sert toujours aux Indiens pour fixer la date de leur mariage, le prénom d'un nouveau né.... elle servait aussi à donner aux Maharadjas la bonne date pour lancer une opération militaire. Dans les locaux de notre hôtel Trident, nous découvrons qu'un astrologue attend les clients sans doute pour fixer une date d'importance.
Le palais de la Cité est toujours occupé par les Maharadjas du Rajasthan. Quelques pièces-musées installés dans les pavillons du palais évoquent leur vie passée et actuelle.
C'est le lendemain que nous allons encore une fois être éblouis par la magnificence des palais des Maharadjas. Quelle bonne idée de nous avoir fait découvrir Amber, ancienne capitale du Rajasthan, par la forteresse de Jaigarh. Outre que ça nous permet d'éviter les embouteillages, nous arriverons à Amber par les hauteurs et nous trouverons le luxe d'Amber après nous être imprégnés de la rudesse de cette garnison dédié à la guerre.
Le palais, dont les bâtiments s'étagent autour de cours, abrita les souverains du Rajasthan à l'époque moghole.
Il a des aspects du palais de Fathepur Sikri, que nous avons visité en 2003 et que nous reverrons le lendemain. Il me rappelle aussi l'Iran, à cause de l'utilisation de mosaïques de verre, du système d'irrigation et du dessin des jardins.
Comme dans tous les palais et forts visités, les femmes observaient la vie derrière les « jali ». Peut-être n'étaient-elles pas si malheureuses dans leurs Zenana ?
Nous quitterons Jaipur le lendemain après un dernier coup d’œil au « palais des vents » construit pour que les habitantes puissent voir la vie dans la rue sans être vues et dans un courant d’air frais.
Ce matin-là, nous passons la frontière entre Rajasthan et l'état d'Uttar Pradesh en direction d'Agra. Nous avons eu l'impression de nous retrouver alors sur une autoroute à la circulation un peu plus « policée » mais quelques vues nous rappellent que nous sommes bien toujours en Inde.A Fatephur Sikri nous retrouvons dans le palais d'Agkbar le grès rouge et ses dentelles de pierre. Dans la mosquée et le mausolée, on autorise tout le monde à rentrer à condition de faire comme tous les pratiquants : déposer ses chaussures et mettre un foulard pour les femmes et un curieux petit calot en plastique pour les hommes.
Le lendemain, lever aux aurores pour ce dernier jour : il s'agit de voir le lever de soleil sur leTaj Mahal... Bon, on fait la queue avec beaucoup de touristes pour finalement constater que le soleil est bien pâle et que la lumière du soleil plus haut sur l'horizon suffit largement à magnifier le monument !
Pour finir notre voyage au Rajasthan avec toujours ce grès rouge : le fort rouge d'Agra. Il est lui aussi sujet à beaucoup de sorties scolaires et on comprend, c'est tellement beau !
Il semble que Shah Jahan (le commanditaire du Taj Mahal) y ait été tenu prisonnier par son fils mais quelle prison ! Et avec une vue sur le mausolée qu'il fit construire pour sa bien-aimée !
Et notre voyage en Inde se termine à Delhi, que nous retrouvons polluée et embouteillée à cette heure de la journée ; heureusement qu' Azhad chauffeur virtuose connaît bien et conduit au millimètre. Nous arriverons à l’aéroport en temps et en heure.
Avant de conclure, je voudrais insister sur ce que j'appellerai « les plus de ce voyage». Une vrai bonne entente entre le guide, le chauffeur et son aide ! Tous connaissaient leur pays et avaient une excellente maîtrise du circuit, des lieux traversés, des hôtels et des habitudes des voyageurs (nous avons toujours pu manger non épicé grâce à la prévenance de Thustop).
Un hommage particulier à Thustop pour le partage de ses connaisances toujours au bon moment. J'ai beaucoup apprécié les explications sur les rites funéraires à l'occasion de la visite du Cénotaphe Bara Bagh à l'entrée de Jaisalmer ou la démonstration de la préparation du "thé masala".
Pendant quelques transferts un peu longs, notre guide s'organisait pour nous expliquer le système des castes, l'Hindouisme (Brahma, Vishnou, Shiva, Garuda, leurs attributs et leurs avatars... n'ont théoriquement plus de secret pour nous!), le Bouddhisme par un commentaire d'une roue de la vie, le Jaïnisme et la religion des Sikhs....
" Un grand merci de nous avoir donné quelques clés pour mieux comprendre le Rajasthan et l'Inde. "
L'arrivée dans les hôtels était toujours un moment de plaisir. Qu'allions-nous découvrir cette nuit après l'accueil qu'on nous y réservait ? Tous les hôtels retenus avaient un charme particulier. A Alsisar, nous avons eu droit à un luxueux palais de Maharadjas très bien aménagé. Au Gajner Palace, fréquenté avant nous par pas mal de têtes couronnées et chefs d'état, nous nous sommes contentés des sculptures du parc alors qu'eux venaient y chasser de vrais tigres et lions au temps de la domination anglaise. Nous y avons dormi dans une suite de six pièces, rien que pour nous deux !
Mentions particulières au Hill Top Palace de Khumbalgarh pour le spectacle de danse pendant le dîner. Au Bijaipur Castle pour son accueil et sa décoration restée très authentique et au Bijay Niwas Palace de Bijaynagar pour son charme désuet des années 50 !!
Nous garderons le souvenir d'une riche civilisation et d'un pays tout aussi riche de ses couleurs : depuis le grès et le marbre des palais, leurs décorations chatoyantes jusqu'aux couleurs des vêtements des femmes et des hommes.
Heureusement que nous sommes tous différents et que toutes les civilisations ont accompli des merveilles pour s'adapter aux territoires où elles se sont implantées. Plus on voyage, mieux on comprend la diversité de notre monde, et plus on a envie de découvrir d'autres contrées !
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