Le Tibet avec Trek Mag
Carnets de voyages - Asie Pacifique - Tibet - 06.05.2011
L'arrivée au Dôme Rouge... Nous nous sommes levés à 6h30 du matin. C'était l'heure de Beijing. Dans cet endroit reculé, il était peut-être 4h seulement. Après avoir pris le petit déjeuner, nous sommes partis vers 8h pour monter au Dôme Rouge. Chhime, notre guide tibétain nous avait dit hier qu'il fallait trois heures de marche pour y arriver et une heure trente pour redescendre. On est tous montés tout doucement. C'était notre troisième jour de marche. Il faisait beau et le ciel était bienveillant. Mais les nuages arrivaient depuis le sud-ouest. Vers le sud, au dessus du massif du Cho Oyu, les nuages se formaient déjà pour le couvrir un peu tandis qu'à l'ouest du dôme, le massif des Lapchi Kangs nous souriait majestueusement. Le vent soufflait très fort. Je me demandais pourquoi ce vent soufflait si fort depuis hier. Est-ce la bataille entre le froid et le chaud comme disent les météorologues ou est-ce Chana Dorje, Vajrapani en colère qui voulait chasser les mauvais esprits ? Bernard et Alain étaient devant nous. Ils sont forts Bernard et Alain ! Ils peuvent marcher à ce rythme à cette altitude ! Je voyais cet immense plateau tibétain et ces montagnes magiques autour comme dans mon imagination et dans mes rêves. Trois gazelles couraient gracieusement, comme si elles voulaient nous montrer le chemin pour aller au Dôme Rouge ou, qui sait peut-être, jusqu'au paradis ? Je marchais doucement sans me hâter en inspirant et en expirant au rythme de mes pas. Soudain, j'ai eu cette vague impression qu'une de ces trois gazelles voulait me souffler quelque chose à l'oreille... Je lui ai tendu mon oreille droite pour l'écouter tel un Milarepa. En me voyant confus et perplexe, elle m'a murmuré : "tu vois ces petits points noirs ? Ce ne sont pas des yaks, ce ne sont que des fourmis peintes dans un cadre désertique avec quelques nuances couleur pâturage. Et toi aussi, tu n'es qu'une fourmi parmi les milliards d'autres dans cet univers immense. Toi, tu te crois l'univers entier mais tu n'es qu'un atome, tu n'es qu'une molécule au fond". "Et si tu vas plus loin encore, tu verras que tu n'es que vide" a ajouté la deuxième gazelle. Ensuite c'était le tour de la troisième gazelle : "Et dans ce vide, toi, tu n'existes plus. Il n'y a qu'un Maitreya mi-assis, mi-debout, un futur Bouddha... Ne vois-tu pas qu'il est en train de te sourire ?" Moi, je ne voyais que cet immense plateau désertique devant moi, et moi, tout petit. Mais mon "moi" d'artiste voulait entamer une joute oratoire avec ces gazelles. Je leur ai dit à mon tour : "Et cet univers n'existe que parce-que moi, j'existe. Sans moi, comment ton Maitreya existerait-il ? N'est-ce pas ce vide dont vous parlez qui, justement, m'appartient ?" Et à ce moment-là, le vent a soufflé encore plus fort comme si Chana Dorje se mettait en colère à nouveau. Les nuages arrivaient de l'ouest pour couvrir le massif du Cho Oyu. Enfin, j'ai réussi à franchir la première colline. Les gazelles avaient disparu depuis un bon moment... Chhime qui marchait à coté de moi m'a offert des fruits secs à manger. Je l'ai remercié en lui disant qu'il devait attendre les autres. Moi, je suis monté vers le dôme à petit pas. En mi-chemin, je me suis arrêté pour boire une petite gorgée d'eau et pour enlever ma veste polaire et mes gants. Au moment où j'étais sur le point de remonter, un de mes gants est tombé et il a roulé emporté par le vent. La voix de Bernard a résonné dans mon esprit. Il disait hier dans sa conférence sur les ascensions en monde himalayen que l'on n'avait pas le droit de perdre ses gants si on voulait gravir un sommet. Ce Bernard qui avait gravi le Dhaulagiri au Népal et qui est aussi un connaisseur de l'histoire des ascensions dans les Himalaya m'est très sympathique. Justement, j'étais très étonné par son discours d'hier. J'ai couru pour rattraper ce gant. Chhime qui était derrière moi, m'a aidé à le récupérer. Quand je suis arrivé au sommet du dôme, Bernard était déjà là avec Alain, Gisèle, Gérard et Denise. Le soleil brillait à l'est. En arrivant au dôme, j'ai mis une pierre sur un cairn qui se trouvait là. J'ai regardé mon altimètre qui indiquait 5430m. Derrière moi, les silhouettes se dessinaient clairement. C'était Aline, Robert, Francette et Stéphanie. On a fêté tous ensemble cette ascension au Dôme Rouge en s'embrassant de bonheur et prenant des photos du paysage. L'astre solaire brillait bien loin au dessus de nous. La flèche spirituelle avec ces treize cercles et la demi-lune étaient invisibles. On n'était arrivé que sur ce dôme ! Mais pendant une vingtaine ou une trentaine de minutes, on a goûté à cette nourriture céleste. On a pris de nouveau des photos du groupe. En bas les autres nous attendaient avec la nourriture terrestre. Maintenant il fallait redescendre sur terre ! Alors, nous avons décidé de descendre lentement. Le Cho Oyu n'avait plus honte de se montrer tout nu. Derrière ce Cho Oyu, je devinais Le Népal, mon pays natal, en train de vivre une nouvelle journée avec ses hauts et ses bas. Alors que nous descendions, j'ai aperçu que les fourmis noires commençaient à bouger, petit à petit, pour sortir de leur cadre. Quand je suis arrivé plus près, ces fourmis se sont transformées en un troupeau de yaks. Derrière ce troupeau, les deux bergers étaient sans doute père et fils. Ils m'ont fait un sourire et un signe de la main pour me souhaiter un bon retour vers le pied du dôme. En bas, les autres fourmis se sont transformées à leur tour en êtres humains, avec leurs qualités et leurs défauts. Nous sommes bientôt partis en 4X4 vers Langkhor, notre prochaine destination !
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