Voyage au Ladakh, Samsãra ladakhi
Carnets de voyages - Asie Pacifique - Inde - 26.06.2015
Le matin, à cinq heures, nous sommes réveillés par les patenôtres du monastère qui, relayées par haut-parleur, n'ont rien à envier à l'appel à la prière d'un muezzin... Bonne nuit, réparatrice ! Un coup d'oeil par la fenêtre, c'est le grand beau temps et les montagnes étincellent... encore une journée qui s'annonce bien ! Il y a une mosquée à Padum (moderne, assez moche), mais elle est suffisamment loin pour qu'on ne l'entende pas car la rivière en couvre le bruit. L'emploi du temps des moines est immuable : lever quatre heures puis prières jusqu'à sept... une petite pause pour boire le thé et c'est reparti jusqu'à dix ou onze heures. Le bouddhisme tibétain est la religion prépondérante dans la vallée, bien que l'influence animiste et chamanistique persiste. Il y a également une petite minorité de Musulmans shiites. La cohabitation Mahomet-Bouddha n'est pas toujours une vallée de roses. La population vit principalement dans de petits villages dispersés, le plus grand est la capitale Padum, avec presque 700 habitants permanents. Après un bon petit-déj, nos nouvelles voitures nous attendent : des Mahindra Scorpio [1]. Des véhicules un peu moins vastes mais plus robustes, plus tape-cul aussi ! Notre nouveau chauffeur s'appelle Thundup. Sur la piste, c'est un virtuose, il lit les trous et bosses à l'avance et négocie chaque obstacle à la perfection. Bravo l'artiste ! En route, nous remonterons la vallée de la Tsarap sur une trentaine de kilomètres. Cinq kilomètres après Padum, à 3650 m, nous sommes bloqués par un chantier, un bull élargit la piste mais il y a dix mètres-cube de terre et cailloux en plein milieu. Dans les tentes du chantier mobile, les cuisiniers s'affairent à préparer le repas de midi : le préposé aux chapatis [2] usine dur... dehors, une femme file de la laine de mouton avec sa quenouille. Nous laissons guide et chauffeurs et continuons à pied. Les véhicules tardant à venir, nous marchons assez longtemps. Quand ils arrivent, Thustop nous raconte leur mésaventure : le chauffeur d'une des deux Mahindra (pas la nôtre, l'autre) est passé trop près du bord qui a cédé. Le véhicule est resté en équilibre au-dessus du vide et ils ont dû aller chercher les ouvriers du chantier pour les aider à remettre la voiture sur la piste. Le chauffeur a eu tellement peur qu'il laisse le volant à notre guide, beaucoup plus expérimenté... Je pense que son stage de formation à la conduite a dû être vite expédié car il n'est vraiment pas doué le garçon ! Si le village est très beau, le monastère l'est aussi. Un moine nous montre les livres sacrés : celui qu'il nous ouvre date du XVIIe siècle, il contient 432 pages et il y en a 108 comme celui-ci. Ils contiennent la parole du Bouddha. Il faut trois jours pour lire entièrement l'un de ces livres ; mais, bon, ils n'ont pas grand-chose d'autre à faire ! Livre est d'ailleurs un mot mal adapté. En fait, il s'agit d'une pile de feuilles mesurant chacune environ cinquante par vingt centimètres (orientation paysage comme on dirait en informatique), non reliées entre-elles. Au total, une épaisseur d'une quinzaine de centimètres par volume... Au-dessus et au-dessous, deux planchettes pour fermer. L'ensemble est soigneusement emballé dans un tissu jaune fermé par des liens en tissu jaune également. La bibliothèque de chaque monastère contient ces 108 volumes. C'est à cette lecture que les moines consacrent le plus clair de leur temps... le mot productivité n'a pas encore franchi ni les cols ni les montagnes ! À 18h15, nous retrouvons avec plaisir notre lodge, notre seau d'eau chaude et le repas du soir.
[1] Le style jeep. Elles existent en deux ou quatre roues motrices ; les nôtres se contentent de deux car il n'y a ni boue, ni sable, ni neige ; mais les suspensions et la garde au sol sont les mêmes que pour les 4×4. Pourtant, parfois, les vitesses courtes auraient été bien utiles pour digérer certaines pentes particulièrement raides. Thundup a parfois dû reculer pour prendre un peu d'élan. Les seules voitures françaises aperçues au cours de ce voyage auront été des Dacia : quelques Logan et, surtout, des Duster, le 4×4 franco-roumain (mais dans sa version 4×2 uniquement). C'est surtout sa garde au sol et sa rusticité qui intéressent les Indiens (en plus de son prix, naturellement). Mais, ici, ces deux voitures sont badgées Renault et non Dacia comme chez nous.
[2] Minces galettes de pain cuites sur une plaque chaude ; à ne pas confondre avec les nans qui, elles, sont cuites au four et sont donc plus moelleuses.
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