Balade chez les Khmers
Carnets de voyages - Asie Pacifique - Cambodge - 10.01.2011
Kratie n'est pas encore un lieu vraiment habitué avec les voyageurs étrangers. Ainsi ce matin le petit déjeûner, en dehors de la baguette de pain insipide (mais considérée ici comme un met raffiné, héritage des colons français), est plutôt local : riz gluant accompagné de poissons fermentés épicés au curcuma !
Sok en profite pour nous donner quelques chiffres sur l'économie de son pays. Trois secteurs principaux contribuent au budget global du Cambodge. En premier lieu l'aide internationale qui représente d'ailleurs la majorité de celui-ci, puis les revenus tirés de l'agriculture et enfin le tourisme, véritable secteur en pleine expansion. Le pays a accueilli en 2010 plus de trois millions de touristes, contre deux en 2009. Malheureusement ces chiffres masquent une réalité moins pimpante. La majorité des visiteurs se concentre sur Siem Reap et Angkor, pour des durées courtes et principalement en extension de voyages vers le Vietnam ou la Thaïlande. Le type de voyages que Tirawa, par exemple conçoit, c'est-à-dire de véritables découvertes de ce pays, restent rares.
Le but de cette journée est de rejoindre la ville de Kompong Thom, située presque au centre du pays. Nous suivons la rive gauche du Mékong jusqu'au bac de Stung Trong pour passer sur l'autre berge. En route, premier stop pour visiter un village habité par des Khmers Cham. Cette ethnie, de confession musulmane, vient du Vietnam. Ils ont été chassés au XVème siècle après l'invasion de leur royaume (Champa) par un roi expansionniste. En réaction contre cette invasion, les populations qui étaient alors hindouistes, avaient décidé de changer de Dieu protecteur et s'étaient tournées vers l'Islam. En remontant le Mékong, cette ethnie avec une nouvelle religion s'était fixée autour de Kompong Cham (qui signifie le débarcadère des musulmans). Longtemps persécutées comme le sont souvent les minorités, ils avaient vu leur sort s'améliorer lorsque le roi Norodom Sihanouk, en 1941, donna la liberté de culte à tous les Cambodgiens. La folie des Khmers Rouges reprendra les persécutions. Nouveau retour à la paix depuis dix ans, mais maintenant un autre problème surgit ! Il y a une radicalisation de cet Islam par l'arrivée de plus en plus pressente d'imams à la solde des Arabes. Ses derniers injectent pas mal d'argent dans ces communautés, apportant une " purification " comme ils disent avec entre autre l'apparition du voile plus ou moins intégral des femmes. Dans ce village nous observons le travail des feuilles du latanier, un palmier local. A la sortie du hameau nous faisons un arrêt au " gite d'étape ". Une tradition typiquement khmère qui date de l'époque du plus grand roi d'Angkor : Jayavarman VII (plus connu sous le diminutif J VII) qui dirigea entre 1181 et 1219. Ce roi avait fait construire cinq grandes routes radiales autour d'Angkor. Le long de ces routes, le roi fit construire 102 hôpitaux et 121 gites d'étapes, distants chacun de 1 Yoch, c'est-à-dire 16 kilomètres environ (soit une matinée de 4 heures de marche). Chaque gite était constitué de 3 bâtiments : la chapelle en pierre pour abriter le Dieu des Voyageurs et le feu, la salle en bois (et en général sur pilotis) pour accueillir les passants et leur offrir un toit pour dormir, et un étang afin de donner l'eau et le bain rituel. Actuellement il y a souvent une pièce uniquement, mais chaque village possède son gite, qui reste bien sûr ouvert à tout voyageur et ceci de manière totalement gratuite. Chaque année il y a une fête devant ce bâtiment, en général avant la saison des pluies. Cette fête est réalisée en l'honneur du génie foncier (Neak Ta, l'équivalent d'Arak chez les Animistes). Bien que le pays soit bouddhiste, dans les faits la religion est une sorte de syncrétisme qui utilise 15% de rites animistes, 70% de rites hindouistes et 15% de rites purement bouddhistes. Dernière particularité du gite d'étape : en général seul le mur Sud est construit, laissant les trois autres côtés libres. En effet lors de la saison des pluies, celles-ci proviennent du Sud (mousson d'été de juin à octobre, le vent vient de la mer et de l'Equateur, situé au Sud). Durant la saison sèche le vent vient du Nord, apportant sécheresse ... et froid (tout relatif, mais les Cambodgiens ont réellement une sensation de froid lorsque le mercure descend en dessous de 20° !). Dans un autre village nous sommes accueillis dans une grande maison alors que nous nous étions arrêtés pour la photographier. Après le passage du bac, visite de Vat Hanchey, un site de pèlerinage qui abrite deux sanctuaires datant du VIème siècle, situé sur un promontoire qui domine le Mékong. Un peu avant Komong Thom, nous faisons un stop chez les tailleurs de pierre de Kakaoh. Des artisans sculptent des énormes pierres pour en faire des représentations de l'art bouddhique. Ce sont principalement des commandes pour les monastères, en reconstructions dans beaucoup de coins du Cambodge. On pense que le régime de Pol Pot et la guerre civile ont été à l'origine de la destruction de plus de 3000 monastères. Dernier arrêt dans une briquetterie traditionnelle. La famille qui est en charge de ce lieu, est en train de remplir le four de 240 000 briques simples. Le processus global de cette fabrication (entre la terre brute de départ et la vente des briques) prend environ deux mois ! Un charmant hôtel, en bordure d'une rivière, nous accueille pour la nuit.
Femmes de la minorité Cham
Habitat traditionnel
Scènes de vie
Maison Cham
Un gîte d'étape traditionnel
Un gîte d'étape plus moderne
Visite d'une maison
Traversée du Mélong en barque
Sur la colline de Vat Hanchey
Centre de pèlerinage de Vat Hanchey
Temple en brique du VIème siècle, Vat Hanchey
Vue de Vat Hanchey sur le Mékong
Village de sculpteurs, Kakaoh
Intérieur du four d'une briquetterie
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