Balade chez les Khmers
Carnets de voyages - Asie Pacifique - Cambodge - 10.01.2011
Village dans une zone de brulis
Au programme du jour : une grande balade dans la forêt de Ratanakiri, à la rencontre de l'ethnie Kroeung. Vingt minutes de voiture et nous voici à Kalai, petit village en bord de route. Sok récupère le guide local qui va nous conduire dans cette immense forêt. Avant de vous décrire ce que l'on rencontre dans cette forêt, voici quelques informations sur ce groupe de population. L'état du Ratanakiri compte 150 000 habitants, et cette ethnie en représente 15%. Cette peuplade pratiquait autrefois le nomadisme, sur des périodes très longues, lorsque les terres qu'ils cultivaient et les forêts alentours ne suffisaient plus à leurs besoins. L'état central khmère tente de mettre fin à ces pratiques, et le dernier village qui a totalement migré (Kress) l'a fait il y a huit ans. Lorsqu'un village veut s'installer dans un nouveau lieu, le Gourou fait des repérages, et lorsqu'un terrain semble convenir pour une nouvelle colonisation, il plante au coeur du lieu un bananier ... et il attend quelques semaines pour voir si l'arbre pousse. Si tel est le cas, ce bananier devient sacré et personne n'a le droit d'y toucher ou de manger ses fruits. Une maison commune est alors construite. Elle servira pendant les trois premières années de l'installation comme grenier à riz commun, tout le monde mettant ses récoltes à disposition de l'ensemble de la population. Chacun construira son grenier à riz ensuite. Le village est installé en rond autour de la maison commune, chaque famille ayant son propre toit. Des zones de brulis sont ensuite dégagées dans les alentours et des cultures sommaires sont effectuées dans ces zones. Chaque famille va de plus construire dans ce lieu de culture une autre maison, qui servira de maison d'habitation pendant toute la période de plantation / développement / récolte, ne revenant au village qu'une fois le cycle accompli, en entassant la récolte dans les greniers individuels. Arak, le génie protecteur veille sur la communauté et le Gourou est son intermédiaire avec le commun des mortels. Le Gourou habite en dehors du village, et n'intervient que lorsque son 6ème sens lui indique que quelque chose (souvent de maléfique) va arriver. Il faut alors faire des sacrifices d'animaux, souvent des buffles, afin qu'Arak calme son courroux. Les jeunes filles, une fois leurs règles arrivées ( vers 13-14 ans) doivent quitter le toit familial et se construire, à quelques mètres du foyer principal, une petite maison à un ou deux pans, que l'on appelle alors la maison de la célibataire. A partir de la puberté chaque fille peut recevoir à l'intérieur de sa maison tous jeunes mâles en quête d'aventure sexuelle, tant que ces prétendants sont encore célibataires. Lorsque la jeune fille sera enceinte, elle peut soit demander le mariage au dernier homme étant venu l'honorer (et dans ce cas l'enfant aura un nom) ou donner naissance à un enfant sans être marié, enfant ensuite élevé par les parents de la fille (et dans ce cas cela sera un enfant " sans nom "). L'accouchement étant de toute façon considéré comme impur, une nouvelle maisonnette sera construite à l'écart et servira de maison d'enfantement, où le nouveau-né devra rester 4 mois avant de rejoindre la maison principale, la naissance étant considérée comme quelque chose de triste, contrairement à la mort, épisode très gai. Pour les garçons, la même chose se passe à la puberté. Ils doivent quitter le nid familial et se construire une maison indépendante (souvent haut perchée sur des bambous dressés) et devra se trouver une promise après avoir fait son éducation sexuelle dans une totale liberté de moeurs. Après toutes les explications de Sok, nous voici enfin partis pour une longue marche de 5h30 dans une forêt qui est restée en grande partie encore inviolée. Le sentier nous fait traverser d'abord des zones de brulis, les récoltes ayant été effectuées, les maisons sont désertes et les champs vides. Puis nous pénétrons dans cette forêt magnifique. L'arbre majoritaire rencontré est le Lagerströmia Caliculata, géant à l'écorce blanche qui pèle régulièrement. Cet arbre est quelque fois abattu par les locaux car souvent, dans les branches supérieures, des iguanes nichent et, malheureusement pour ces animaux, leur chair est revendue très chère à des trafiquants chinois. Trois autres espèces d'arbres de la famille des Leguminosa poussent ici. Le Kakoh (3ème qualité) au tronc noir, le Beng (qui sert surtout de bois de construction, 2ème qualité) et enfin le Kagnoung (plus connu sous le nom d'arbre de fer, 1ère qualité, destiné surtout pour la marquèterie). Enfin, le roi de cette forêt : le Gommier, géant qui peut atteindre plus de 50 mètres de haut, et qui vit jusqu'à 700 ans. Son écorce est parfois brûlée pour en extraire une gomme visqueuse qui sert au calfatage des bateaux. Au coeur de la forêt nous rencontrerons une équipe de pêcheurs et un chasseur armé d'une arbalète redoutable et de flèches empoisonnées. Pique-nique devant une grande vasque d'eau fraîche. Nous retrouvons notre véhicule à Vorng. Visite ensuite du village de Kress. Nous arrivons alors qu'un sacrifice de buffle vient d'être réalisé, hommage rendu par le Gourou à Arak qui a permis la guérison d'un malade. De nombreux invités à cette célébration ont le regard vague de ceux qui ont fortement abusé d'alcool de riz. Dans ces cas là, il ne vaut mieux pas s'attarder. Visite du village et retour à notre hôtel camp de base à Ban Lung. Point de départ du trekZone de brulisDans la forêtPont sommaireMaison dans les champsLagestromiar CaliculatarRencontres avec des pêcheursPique-nique dans une vasque d'eauChasseur avec une arbalèteFin du trekMaison de l'ethnie KroeungMaisons des jeunes filles, ethnie KroeungMaison d'un jeune homme, ethnie KroeungFemme KroeungMaison Kroeung à Kress
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