Bolivie : des tropiques à l'Altiplano
Carnets de voyages - Amériques - Bolivie - 25.09.2013
Sur le sentier Inca qui descend vers le village de Chaunaca,
à travers la Cordillère de Los Frailes Un matin laiteux, opaque, avec un ciel comme du verre dépoli. Les cimes de la cordillera de los Frailes sont noyées dans une mélasse aussi épaisse que la soupe de maïs locale. Nous nous élançons à l'aveuglette sur le sentier dallé, tout imbibé de brume, l'un de ces nombreux chemins pré-hispaniques empruntés peut-être par les chaskis au pied léger qui sillonnaient les Andes en tout sens pour porter les nouvelles et les petits colis avec une efficacité qui conduirait aujourd'hui DHL au dépôt de bilan. La couverture de nuages se déchire enfin. La grande vallée de Chuanaca avec ses montagnes au pelage de chien eczémateux s'illumine d'un coup. Tout au fond, la piste parcourue seulement par une poignée de paysans aussi noueux que leur bâton de marche mène au cratère de Managua, une curiosité géologique aux origines fort mystérieuses. Pour expliquer cet amphithéâtre de collines griffées de croissants concentriques, une première hypothèse sans doute cautionnée par les frères Bogdanov évoque le crash d'une météorite venue de l'espace. Faites tourner le joint. La seconde, enseignée à l'école de tourisme de Sucre, parle d'un lac porté à ébullition par une remontée de magma et dont les fonds se seraient déposés en pétales alentour. Aussi crédible qu'une inversion de la courbe du chômage avant la fin de l'année. Moins émoustillant mais plus vraisemblable, la version de géologues qui avancent la surrection simultanée de deux chaînes de montagnes qui aurait donc comprimé le plateau qu'elles encadraient, et en auraient relevé les bords de façon symétrique de sorte que les sédiments se seraient accumulés en son centre. Vous n'avez rien compris ? Tant pis, fallait faire des études... Oublions donc la géologie pour les nuls et ouvrons la rubrique faits divers qui généralement remporte plus de succès. Au bout de la vallée, il y a un charmant village qui s'appelle Quila Quila. Les eucalyptus y bruissent sous la bise en libérant leurs parfums émollients tandis que les petits cochons s'entretiennent les jambons en cavalant dans les rues désertes. Au centre du village, une brave église et son clocher de tuiles rouges, et derrière l'église, au pied d'un mur en pisé, une sorte de trou rectangulaire mal rebouché. C'est là, il y a un an et demi, qu'ont été enterrés vivants deux lascars de La Paz qui ont eu la mauvaise idée de voler deux peintures plus ou moins historiques accrochées dans la nef de l'église. Surpris peu après leur larcin, passés à tabac, escagassés, lapidés, les malheureux ont fait les frais de l'implacable justice communautaire et ont fini dans le trou avant d'être ensevelis sous la glaise. En guise d'avertissement, leurs vêtements ont été suspendus dans un arbre, bien en vue à l'entrée du village. Le visiteur peut aujourd'hui contempler du bord de la route ces sinistres épouvantails et ressasser l'adage " Bien mal acquis ne profite jamais ". On ne rigole pas avec les biens de la communauté. Une semaine après le lynchage, la police, prévenue par les gens du village, est venue récupérer les corps avant de repartir le képi bas et la matraque en berne sans que quiconque ne parle. Tous soudés comme un seul homme face aux menaces venues de l'extérieur. Un conseil : si vous aimez les toiles de maîtres, évitez de les voler dans les églises des hauts plateaux boliviens. Faites plutôt comme Claude Guéant, c'est tout de même moins risqué.Les Gorges du DiableDepuis le promontoire situé au centre du cratère de MaraguaDepuis le promontoire situé au centre du cratère de MaraguaL'église de Quila Quila...Vieux pont sur la route entre Sucre et Potosi
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