Voyage au Ladakh
Carnets de voyages - Asie Pacifique - Inde - 29.08.2013
Il faut dire un mot des improbables routes ladakhies. Un peu de vocabulaire pour commencer : ici, tout ce qui est goudronné et sur quoi deux véhicules peuvent se croiser, fut-ce en serrant les fesses, s'appelle "highway". Tout le reste s'appelle "road". Il arrive qu'une "road" soit goudronnée. Mais rarement sur toute sa longueur. De manière inopinée, elle se transforme en piste, accessible seulement aux 4X4 et aux s'en-fout-la-mort dans leurs pick-up brinquebalants. Il se peut du reste que plus loin, le goudron refasse son apparition. Limites de communes, ou de districts ? Limites de crédits ? Seul Bouddha le sait. Peut-être. Village de Thugle, sur les rives du Tso Khar Les routes stratégiques (elles le sont toutes) traversent des camps ou des zones militaires et sont hérissées de check-posts, pas tous actifs. Dans ceux qui le sont, un fonctionnaire note sans conviction votre numéro de passeport dans un grand cahier. Ou pas. On ne peut jamais prévoir. Le grand cahier, que devient-il ensuite ? Quelqu'un l'ouvre-t-il un jour ? Seul Bouddha le sait. Peut-être. On y croise toutes sortes de véhicules, et en particulier les lourds camions militaires qui crachent une épaisse fumée d'un noir profond. A croire qu'ils marchent au charbon ! On ne serait pas surpris de voir émerger de la cabine du camion la tête de Gabin dans La Bête humaine... On y rencontre aussi des chantiers de rénovation, où tous ceux qui travaillent ont la peau très noire, beaucoup plus que les Ladakhis. Explication : cette main d'oeuvre à vil prix est importée du Bihar, état de la Fédération indienne dont la population est si pauvre qu'elle accepte n'importe quoi, n'importe où, à n'importe quel prix. Leurs méthodes de travail sont archaïques, leurs outils plus encore. Ils concassent les cailloux du ballast à la masse, transportent l'eau dans des jerrycans à dos d'homme, et font chauffer le goudron dans des sortes de braseros. Au bord de la route, sur le chantier même, une tente minable les abrite. Vous n'imaginez tout de même pas qu'un véhicule va venir les chercher le soir pour les conduire à un hébergement décent ? La route que nous avons prise aujourd'hui est un amour, un bijou de route ladakhie. Au départ de Serti, en direction du col ChangangLa : un vrai tapis, goudronnée de frais. Puis subitement, une piste, du genre à vous briser les essieux. Et les reins par la même occasion. Et ainsi jusqu'au col, qui se proclame fièrement le 2ème col le plus haut du monde : 5360 mètres, tout de même. Au col, un minuscule temple où les militaires s'arrêtent pour prier. En descendant jusqu'au lac Tsomoriri, goudron fatigué, tôle ondulée, et piste tout juste tracée se succèdent. Qu'importe... Une route c'est fait pour se rencontrer, et des rencontres nous en ferons beaucoup, et de toutes sortes. Ce campement nomade où une famille de bergers nous accueille près de sa tente en peau de yak (étanchéité garantie par tous temps). Ces mécanos pieds-nickelés qui, pour déjanter en vue de réparation un pneu malade, ont inventé une méthode radicale : la roue est posée au milieu de la route, et un autre véhicule roule sur la joue du pneu. Ça exige un peu de précision, mais ça marche... Nous rencontrerons aussi un couple de grues à cou noir, un troupeau de yaks, une horde d'ânes sauvages, et même une famille de chamois au grand complet : monsieur chamois, madame étagne, et les enfants éterlous. Et au bout de la route, devinez ? Le check-post de la "Indo-Tibetan Border police". Pour accéder aux rives du lac, une autorisation préalable est requise, et le militaire armé qui occupe la guérite n'a pas l'air de plaisanter. Vous avez remarqué ? La frontière est "Indo-Tibetan", pas "Indo-Chinese". Vieille gompa de Thugle
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