Voyage au Ladakh
Carnets de voyages - Asie Pacifique - Inde - 29.08.2013
Le glacier Durung Drung Il faut deux jours de piste pour aller à Padum, le chef-lieu de la province du Zanskar, depuis Kargil, la ville la plus proche. L'été. L'hiver, inutile d'y penser : la piste et rendue impraticable par la neige, les cols sont bloqués. Pas d'aérodrome. De novembre à juin, la bourgade et les villages qui l'entourent sont totalement isolés. Du coup, la région fonctionne en autarcie. Le district de Kargil a financé l'achat par les habitants de terres pour y installer des potagers, et de serres pour produire des légumes frais toute l'année. En cette fin d'été, tout le monde est affairé à faire les foins, et à les empiler en couches de près de 2 mètres, sur des lits de branchages, sur les toits plats des maisons. Voilà un excellent isolant contre les froids terribles de l'hiver himalayen. On bichonne les yaks, les vaches et les moutons, qui fourniront les protéines jusqu'à la prochaine belle saison. Dans le genre "circuits courts", les Zanskarpas pourraient donner quelques leçons. Arrivée à Pipiting Nous ne logeons pas à Padum, mais à Pipiting, à quelques kilomètres, gros village rural étendu dans la plaine. Peut-on appeler en France depuis Pipiting ? Oui, il y a un téléphone public. Mais le préposé secoue tristement la tête en montrant l'appareil qui ne délivre aucune tonalité. La faute au soleil, explique-t-il. Au soleil ? Oui : la ligne est alimentée par des capteurs solaires, et il est bientôt 18 h, le soleil est trop bas derrière les montagnes. Tant pis. Peut-on, à Pipiting, se connecter à Internet ? Mais bien sûr ! Regardez le cybercafé, au bout de la rue. Mais un panneau "closed" est affiché sur la vitrine. Une cliente qui patiente nous explique que le patron est en train de réparer le générateur pour avoir de l'électricité. En effet, dans l'échoppe contigüe, nous trouvons un jeune gars, du cambouis jusqu'aux avant-bras, des clés à molettes partout, farfouillant dans un moteur qui a dû voir le jour entre les deux guerres. Après quelques tentatives vaines, un pt-pt-pt rassurant se fait entendre, les ampoules du cybercafé s'éclairent. Mais après avoir configuré son ordi, le commerçant nous regarde avec le même air résigné que le gars du téléphone : pas de connexion. Revenez dans une heure... Retour à l'hôtel, confortable, dont la construction n'est pas tout à fait terminée mais qui fonctionne déjà, pour une bonne douche. Douche ? Un employé nous apporte un grand seau d'eau chaude, et un petit récipient pour verser l'eau. Et nous explique que les panneaux solaires qui, demain, fourniront l'eau chaude dans les chambres, ne sont pas encore raccordés. Tout cela dessine bien sûr l'image d'un territoire arriéré, où rien ne fonctionne correctement, où tout va de guingois. Un territoire oublié de la modernité et de la mondialisation. Ou alors, cela dessine une autre image. Un territoire auto-suffisant, qui pratique les circuits courts et l'économie circulaire comme une langue maternelle. Un territoire ouvert au monde grâce au téléphone et à Internet. Un territoire qui, demain, grâce au solaire, proposera un hôtel de bon standing aux touristes, aujourd'hui rares, qui viendront s'émerveiller des merveilles naturelles de la région. Un territoire intégré dans la communauté mondiale, qui participera via le tourisme à l'économie-monde sans être broyé par le rouleau-compresseur de la mondialisation. Pendant ce temps, nos sociétés occidentales, plombées par les lobbies pro ou anti-nucléaire, pro ou anti-éoliennes, pro ou anti-gaz de schiste, sont incapables de penser une transition énergétique pertinente. Qui est archaïque ? Qui est moderne ? Le monastère de Karsha depuis Pipiting
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